martes, 19 de febrero de 2008

La décroissance comme projet local, un texto de Serge Latouche

La décroissance comme projet local
Serge Latouche



Ce texte est paru dans la revue Politis.

La décroissance semble rénover la vieille formule des écologistes : penser globalement, agir localement. Si l'utopie de la décroissance implique une pensée globale, la réalisation concrète démarre sur le terrain. Un peu partout en France et en Italie, des groupes décroissance se constituent spontanément, organisent des marches, mettent en place des réseaux. L'objection de croissance est au coeur de contestations régionales et locales de plus en plus vives des "grands projets" : Le TGV Lyon-Turin avec son tunnel monstrueux, le Mégapont sur le détroit de Messine, Le Mosé dans la lagune de Venise, les incinérateurs à Trento et ailleurs, la centrale électrique à charbon de Civitavecchia, etc.

La démarche "décroissante" inspire par ailleurs des comportements individuels et collectifs comme ceux qui entendent vivre selon un "bilan de justice", c'est-à-dire une empreinte écologique équitable (13OO familles dans le seul Veneto), les écovillages, les AMAP (Associations pour le maintien d'une agriculture paysanne), etc. L'une des initiatives les plus originales et prometteuses est certainement le réseau des communes nouvelles en Italie. Il s'agit d'une association constituée de chercheurs, de mouvements sociaux et de nombreux responsables locaux provenant de petites communes, mais aussi d'entités plus importantes comme la province (département) de Milan et la région Toscane, qui, au niveau local, veulent résoudre d’une manière honnête les problèmes engendrés par la démesure de la société de croissance. Lors de la dernière réunion du réseau à Bari, en octobre 2005, il y avait 500 participants. L’originalité du réseau consiste dans le choix d’une stratégie reposant sur le territoire, c’est-à-dire dans le fait de concevoir le local comme un champ d’interaction entre acteurs sociaux, environnement physique et patrimoines territoriaux. Selon la charte, il s’agit d’”un projet politique qui valorise les ressources et les spécificités locales, en encourageant des processus d’autonomie consciente et responsable et en refusant le pilotage extérieure (hétérodirection) de la main invisible du marché planétaire” (1). Autrement dit, il s'agit de laboratoires d'analyse critique et d'autogouvernement pour la défense des biens communs rejoignant l'idée de "village urbain" et la voie tracée par les mouvements des "villes lentes" (slowcity) .

Dans la perspective offerte, le local n'est pas un microcosme fermé, mais un noeud dans un réseau de relations transversales vertueuses et solidaires, en vue d'expérimenter des pratiques de renforcement démocratique capables de résister à la domination libérale, dont les budgets participatifs. En attendant les nécessaires changements de "gouvernance" mondiale, des collectivités locales, de la Caroline du Nord à Châlon-sur-Saône, prennent les devants et commencent à mettre en place des plans de lutte contre le changement climatique.

(1) cf. Carta del Nuovo Municipio

1 comentario:

Anónimo dijo...

Reste à en penser les conditions, et c'est là que la réflexion se complique : http://www.mouvements.info/La-decroissance-soutenable-face-a.html